À peine partit, je m'installais confortablement dans mes quartiers. Je ne pensais pas qu'il y aurait de l'action aujourd'hui, disons que les pirates n'étaient pas très actifs ces temps-ci. Cependant, j'avais du travail à faire. Tandis que les autres marins devaient jouer aux cartes, puis à tour de rôle, s'occuper des rôles respectifs pour le bon fonctionnement de cette mission, je me chargeais d'élaborer une stratégie d'attaque au cas où nous tombions sur un navire pirate, puis rapport, rapport, rapport... C'étaient les joies d'être vice-amiral. Toutefois, ce poste me plaisait beaucoup, j'ai fait connaissances d'une belle bande cons que j'avais à ma charge.

Les heures passaient et toujours rien. Je n'avais pas bougé de mes quartiers, je n'en pouvais plus. J'avais bien entamé une bouteille de rhum, pensant que le temps passerait plus vite. Sauf que bizarrement, j'avais l'impression que du mouvement se faisait dehors. Quelques instants plus tard, le maître du navire vînt me chercher, presque inquiète. Presque, car ce n'était pas du tout son genre. Sans doute l'alcool qui me montait à la tête. Bref, je la suivais à grands pas et sortais rapidement de mes quartiers. Que voyais-je ? Serait-ce dû à l'effet du rhum où il y avait réellement en face de nous un navire, prêt à nous attaquer ? À peine avais-je eu le temps de comprendre la situation, que Max me disait avoir organisé la mise en place des canons. Fidèle à elle-même, j'étais satisfait de son travail.


« Avançons, moussaillons ! »


J'avais fait exprès de prendre un bateau très léger avec peu d'embarcations ou très légères, car cela rendait le navire plus rapide et manœuvrable. Nous avions cet avantage. Pour ce qui est l'armement, nous avions également l'avantage, car nos moyens militaires sont nettement supérieurs aux pirates, du moins les équipages dits « normaux ». Ma stratégie était donc de se positionner dans l'angle de mort du bateau pirate, de tirer, jusqu'à ce que ce dernier coule. En cas d'échec, je devrais improviser rapidement.


« Ne vous mettez pas totalement parallèlement à l'adversaire. Mettez-vous légèrement derrière eux, mais totalement non plus, seulement de façon à ce que nous soyons en sécurité et qu'ils soient à notre portée. Soyons leur ombre. »


J'étais près de mât, observant la situation et réfléchissant à toutes contres-attaques possibles.

Spoiler:

Les échanges de tirs commençaient sans plus attendre. La stratégie que j'avais ordonné était toute simple, mais cruellement efficace. Avec le peu de précision que nous disposions à notre époque, au vu de notre position par rapport au navire adversaire, peu de chance pour qu'ils nous touchaient sévèrement. Quant à nous, avec tout l'arsenal dont nous disposions, c'était une tâche assez simple. Cependant, une nouvelle vînt bousculer le cours de cette mission. Évidement, sinon ça ne serait pas drôle. D'après Maximilienne, ces foutus pirates avait des prisonniers de la veille. Voyez-vous, c'est justement cela qui me dérangeait. Pourquoi des prisonniers civils ? Si même c'était des riches, pourquoi simplement ne pas prendre leur argent et partir ? En effet, les pirates pillent les riches, cela ne me dérangeait nullement ; tandis que la Marine « volait » l'argent du contribuable, qui manquait parfois cruellement d'argent. A vrai dire, je n'aime pas la Marine, car elle défendait les civils en contre-partie de leurs investissements financiers. Horrible mentalité. De ce point de vu là, je suis malheureusement du côté des pirates. Mais les deux parties comportaient d'ignobles personnes, c'était pour cela que je rêvais de pouvoir les combattre toutes les deux. Malgré que ce soit suicidaire, bien sûr.

Oups, je m'étais encore une fois emporté dans ma réflexion. Maximilienne était plutôt agressive, avide de sang et de combats. Ces prisonniers étaient une bénédiction pour elle, car elle savait que nous allions devoir aborder ce navire pirate. Pour ma part, j'en profiterais pour récolter quelques informations utiles. Je la regardais dans les yeux quelques instants, je me demande parfois ce qu'elle peut bien convoiter à la Marine pour y rester. Elle avait dégainé son sabre avant même que j'ordonne quoique ce soit. Bref, je me devais de prévenir les autres, c'est à se demander qui était réellement le chef, ici... Tant mieux quelque part. Très honnêtement, je déteste donner des ordres ou dominer d'autres personnes, ce genre de choses me dépassaient totalement.


« Mes braves soldats, nous allons aborder ce navire et sauver les prisonniers. Le vent souffle de plus en plus, il nous sera donc facile d'approcher suffisamment le navire adversaire avant qu'il nous tire dessus, car nous aurons une vitesse largement suffisante. Soyez sur vos gardes, nous leur sommes supérieur quantitativement, puis j'espère qualitativement, mais on ne soit en aucun cas les sous-estimer. Bon courage, moussaillons ! »


Malheureusement, il allait forcément y avoir des morts et des blessés dans les deux camps, ça me désolait avant même d'avoir commencé. Ma foie, c'était la vie. Une fois proche mais pas totalement, je courrais à toute vitesse en direction de la proue et je sautais pour atteindre l'arrière du bateau adverse. Lors de mon envol, je sortais mes deux pistolets de ma ceinture et tirais sur les premiers arrivants. La plupart des matelots n'avaient reçus aucune formation au combat, alors esquiver leurs coups étaient assez simple. Grâce à mes tirs, j'avais déjà neutralisé deux hommes. Ensuite, je dégainais mon long et fin sabre, afin de désarmer mes opposants. Le but pour moi n'étaient pas tuer, je laissais cela à mes compagnons frustrés (cc Maximilienne). Avec quelques tours d'escrimes, c'était réglé. J'allais cependant avoir besoin d'aide, car ils étaient assez nombreux mine de rien.

J'étais heureux de voir quelques-uns de mes compagnons, dont le maître Grevy, se joindre à la bataille avec moi. J'étais assez distrait par les combats de mes acolytes, je ne souhaitais pas qu'il leur arrivait quelque chose. À plusieurs reprises, on faillit me tuer à cause de mon manque de concentration. J'esquivais de justesse. Sauf qu'à un moment, il n'était plus vraiment possible de regarder ailleurs. J'étais dos à l'adversaire et une ombre inhumaine s'affichait au sol. Je sentais quelque chose de pesant, qui se tenait dos à moi, près à me zigouiller. En me retournant, je restais bouche-bée à la vue de ce colosse. Il mesurait plus de deux mètres et son poids devait être un nombre à trois chiffres. Je changeais de stratégie. Un jeu subtil d'escrimeur n'allait pas faire long feu à ce monstre, puis avec sa hache, il ne ferait qu'une bouchée de mon petit sabre fin. Alors sans plus attendre, je rangeais mon sabre et sortais deux couteaux. Il me lançait un coup vertical que j'esquivais sans soucis en décalant mes appuis vers la gauche. Alors qu'il armait un autre coup, apparemment inchangé, je glissais légèrement sous ses jambes, me retrouvant donc derrière lui et je plantais mes deux couteaux sur chaque jambe, plus précisément au niveau des genoux. Je les reprenais décontracté en pensait que c'en était fini pour ses appuis, mais il se retournait et chargeait de ce même coup, que j'esquivais à l'aide d'un plongeon sur le flanc droit. Je jetais immédiatement un de mes couteaux sur son épaule droite, qu'il essayait d'enlever après avoir longuement gueulé de douleurs. À cet, je vis tous les corps qui étaient sans vie derrière lui, des marines comme des pirates, ses propres coéquipiers, il avait abattu ses propres coéquipiers et je ne l'avais remarqué seulement maintenant.


« Espèce d'enflure... Je ne te le pardonnerais jamais... ! »


Je sortais mon flingue sans l'ombre d'une hésitation, puis tirais sur ses deux genoux. Cette fois-ci, en plus de mes coups de couteaux, il s'était totalement effondré, impuissant. Il était à genou. Je fonçais droit sur lui, avec une expression de visage qu'aucun ici avait déjà vue. Mon dernier couteau en main, je fis un bon sur sa jambe gauche et je plantais ma lame sur son crâne. Ma colère était telle, que je ne m'arrêtais pas à un coup, car même mort, je continuais de transpercer sa tête et autres parties de son corps, je n'étais plus réellement lucide. Ce n'était que quelques minutes plus tard que je reprenais conscience, observant ce corps qui était si impressionnant auparavant, mais qui ne ressemblait plus à rien maintenant. Du sang coulait, une assez grande quantité avait giclée sur moi. Tout le monde me regardait. Je ne sais pas si ce type était leur chef, mais on aurait dit que tout s'était arrêté autour de moins, du moins, presque tout. Derrière, mes hommes se battait encore face aux quelques pirates encore avec l'esprit combatif. Mais ce n'était qu'une question de temps avant qu'ils ne puissent se rendre compte de leur effroyable défaite. L'extérieur de leur bateau était bien amochée avec les coups de canons donnés précédemment. Ils étaient également en sous effectif par rapport à nous, manquaient d'organisation et de maîtrise des armes. Autant dire que nous avions à faire à des amateurs, bien qu'assez fortunés quand même. De bons équipements, malgré tout. Je regardais quelques-uns de mes hommes, qui me fixaient également d'un air ahuri.


« Faites attention, ils pourraient tenter une attaque de dernière chance. »


En effet, bien qu'immobiles, ces hommes pourraient rapidement devenir dangereux. Je reprenais mes deux couteaux que je rangeais aussitôt, puis ma droite posé sur le fourreau de mon sabre. Je m'attendais au pire.

"Capitaine ! Une bataille, plus loin ! On dirait que le Vice-Amiral Rainworth y est aussi !"

Le Capitaine pensa pendant un instant que sa vigie se foutait ouvertement de sa gueule, tant ils n'avaient pas croisé un seul navire à aborder depuis le début de la journée, toutefois, il se rendit compte de la véracité des propos de Paulo lorsqu'il tint lui même dans ses mains une longue-vue.

"Nom de Dieu, voilà une occasion qui ne se présente qu'une fois par siècle."

Les gars n'auraient pas entretenu les canons de leur frégate toute la matinée pour rien, voilà au moins une bonne nouvelle. Ils examinèrent le temps d'une minute le bordel qui se déroulait au loin, à l'abri des regards derrière de larges récifs qui étaient fréquents dans la région. Visiblement, une frégate de la Marine dirigée par Anthony Rainworth venait d'aborder un navire pirate et la bataille semblait tourner à l'avantage du Vice-Amiral, qui était lui-même aux prises avec plusieurs adversaires sur le vaisseau ennemi. C'était parfait.

"Allez les gars, faites-moi rugir ces canons et coulez-moi ce navire, et ceux qui s'y trouvent avec !"

Profitant du fait que toute l'attention était portée sur la bataille qui faisait rage, l'équipage de Fernandez fût en mesure de s'approcher discrètement et suffisamment près des deux navires pour pouvoir les allumer à coup de canons. Dans un vacarme assourdissant qui signala par la même occasion leur présence, des dizaines de boulets sifflèrent dans les airs, endommageant pour certains le navire de la Marine, mais surtout, pour la plupart, perforant littéralement la coque du vaisseau pirate sur lequel la bataille se déroulait, laissant de larges quantités d'eau s'y engouffrer. Satisfait, Antonio ordonna immédiatement à ses hommes d'amorcer un replis afin de ne pas directement s'exposer à une contre-attaque, bien qu'il était certain que son assaut surprise en rajouterait au chaos ambiant.

Un boulet de canon passait et explosait non loin de moi, me propulsant légèrement en arrière. Mes oreilles sifflaient. J'essayais de voir d'où venait cette attaque, mais je comprenais bien après que c'était un navire qui se cachait, puis sortait pour attaquer. Une stratégie malicieuse, je n'aurais cru des pirates capables de cela, surtout qu'ils détestaient les techniques de lâches et préféraient s'affronter à la loyale. Serait-ce alors un membre de la Marine voulant ma peau ? Le Bateau n'y ressemblait pas. Qu'importe, il fallait agir. Bon soldat, le maître Maximilienne ordonnait sans attendre le repli stratégique. Beaucoup n'auraient pas aimé qu'elle prenne les devants, mais selon moi, c'était justement son travail de guider les hommes à travers mes pensées et paroles. La Marine n'était plus sur le navire pirates. Quant aux civils, ils étaient maintenant libérés, mais je préférais ne pas les prendre pour leur sécurité. Je leur montrait une barque de secours présente dans tous navires qui se respectait. Les coups de canons continuaient et le bateau ne tenait plus. Notre frégate avait déjà démarré, pensant sans doute que j'étais déjà dedans, mais je n'avais pas le temps de me lamenter. Je courrais à toute vitesse en direction de l'avant du navire pirates, puis une fois au bout, je sautais sur l'arrière de la frégate marine où j'atterrissais de justesse avec une roulade avant. Pendant mon envol, le navire pirate avait totalement explosé. Il s'en était fallut de peu. Bref, il fallait maintenant agir.


«Moussaillons, chargez les canons et tirez en direction de ce récif, droit devant ! »


Stratégie toute simple. Soit, les pirates allaient se prendre les rochers et rester paralyser, soit ils sortir de cette cachette et le combat allait commencer. Enfin logiquement, ils ne pourraient se déplacer aussi rapidement, c'est logiquement impossible. La deuxième étape serait de les aborder à leur tour – y en a assez des abordages pour aujourd'hui. Nos boulets de canons fusaient à toute vitesse en direction du récif, s’écroulant totalement, logiquement sur l'ennemi. Notre vaisseau était toujours aussi rapide, alors nous foncions droit sur eux, afin de finaliser notre stratégie. Cette mission aurait normalement dû comporter plus de renforts numérique, il n'était pas certain que nous puissions rentrer chez nous sains et saufs.

"Ça me plaît ! Qu'ils viennent, nous allons les accueillir !"

Voilà la réaction du Capitaine face à la contre-attaque de la Marine, après qu'ils aient pu s'échapper du cimetière flottant qu'était devenu le navire des pirates qu'ils venaient d'aborder et qui allait désormais gésir au fond de l'eau. Mais Antonio n'était pas un débutant, au contraire, et son équipage, lui, ne venait pas de réaliser un abordage pour en faire un autre dans la foulée.

Ainsi, à grand renfort de coups de gouvernail et de manœuvres délicates, le vent ayant décidé de les aider, ils parvinrent à minimiser les dégâts causés par les bombardements ennemis, perdant tout de même plusieurs voiles au passage et sacrifiant une partie de leur coque supérieure, et foncèrent ainsi, à toute vitesse, droit vers la frégate du Vice-Amiral qui faisait la même chose.

"Accrochez-vous !"

Et fort heureusement pour eux, les membres de l'équipage firent ce que le Capitaine venait de leur dire. Faisant travailler ce pauvre gouvernail comme jamais il ne l'avait fait auparavant et à l'aide de la vitesse accumulée, le navire endommagé de Fernandez dévia de sa course et sa coque vint rencontrer celle de la frégate de la Marine dans un choc terrible, les deux vaisseaux se retrouvant ainsi côte à côte et l'un contre l'autre. Mais il n'était pas question d'aborder.

"On va leur montrer ce qu'on sait faire ! Feu !"

Et sans se poser plus de questions, les hommes d'Antonio allumèrent les canons qui crachèrent leurs boulets à bout portant sur la frégate ennemie.

Leur bateau était assez endommagé, mais il avançait toujours, bien que difficilement. Cependant, alors que nous avancions pour les encastrer, ils réussissaient à en faire de même, provoquant un impact énorme. Bizarrement le capitaine pirate et moi-même avions eut la même idée, tirer à bout portant sur nos deux bateaux. Qu'importe le gagnant, il allait rentrer à la nage. J'ordonnais discrètement à deux soldats de jeter les barques à l'eau, tout en les rattachant au bateau. Les adversaires ne semblaient pas vouloir nous aborder. Une vague ou deux d'attaque au canon devrait suffire des deux côtés. Il devait y avoir beaucoup de victimes en bas. Je prenais un homme avec moi ainsi que trois fusils, puis on s'installait derrière une barricade que tonneaux. Je tirais sur chaque tête qui dépassait, pendant que le soldat me rechargeait les fusils. Je n'étais plus d'humeur à jouer, cela avait assez duré. J'ordonnais aux autres de faire même, laissant à Grevy le choix de faire ce qu'elle voulait d'efficace. Je ne pouvais pas prendre le risque de foncer en direction du bateau adversaire, je me ferais tuer en une fraction de seconde. Logiquement, ils allaient soit nous aborder, soit faire la même chose que nous, mais cela n'en finirait jamais. Je réfléchissais. Il allait me falloir entre cinq et sept secondes pour atteindre l'ennemi, soit deux vagues de tirs. J'organisais les deux vagues, puis un dernier regard au maître Grevy et c'était parti. Je m'élançais dans une course folle et suicidaire, j'avais repéré le capitaine que je devais neutraliser au plus vite. Première vague de tirs : je me m'étais à terre. Deuxième vague de tirs, j'étais déjà en train de sauter, tirant une fois en direction du capitaine sans savoir si je l'avais touché. Une fois au sol, je me couchais afin d'éviter cette deuxième vague. Je roulais au sol. Mon deuxième tir atteignait un homme qui avait faillit me tuer. Je n'avais plus de munition.


« Moussaillons, continuez de tirez ! »


J'essayais de mettre hors de portée des tireurs, attirant vers moi les épéistes, ce n'était pas une tâche facile. Mon expérience et surtout ma maîtrise du combat m'aider à tenir, puis je ne faisais plus dans le charitable, car chaque qui croisait ma lame mourrait aussitôt. J'espérais que le tempérament de Grevy allait encore une fois me sauver la vie. Alors qu'un tireur me visait, j'attrapais un des épéistes qui tentait de me tuer, me servant de lui comme bouclier, puis je surgissais tel un fauve en direction du tireur qui ne pouvait rien faire. Cela devenait épuisant. Devoir faire attention aux malins qui voulaient me tirer dessus et ceux qui voulaient me trancher. Je ne savais toujours pas si le capitaine a avait été touché.

Spoiler:

L'équipage d'Antonio avait l'habitude de ce genre de situations, si bien qu'une partie de ses hommes avaient déjà mis à l'eau les canots de secours parce qu'ils savaient bien comment tout ça allait finir. Et à la vue de la tournure que prenait la bataille, ils ne s'étaient absolument pas trompés. Le temps que les échanges de tirs débutent, les canonniers de Fernandez avaient eu le temps de tirer une nouvelle vague de boulets sur la frégate ennemie et de se mettre de justesse à couvert pour éviter de se recevoir en pleine gueule la riposte de la Marine. Leurs camarades eurent moins de chance lorsqu'ils se reçurent l'une des larges voiles de la frégate adverse, mais ils échappèrent au moins à l'un des mâts de leur propre navire qui venait de se casser la gueule deux mètres plus loin. Les deux frégates étaient littéralement en train de se casser la gueule et, plus que les ponts qui devenaient impraticables des deux côtés, c'est surtout la confirmation que l'eau commençait à s'engouffrer dans les deux cales qui acheva de convaincre les hommes de Fernandez qu'ils avaient bien fait de préparer la retraite.

Du côté de Fernandez justement, il avait eu le réflexe de s'accroupir derrière son gouvernail, ce qui lui évita de se prendre une balle en pleine tête, celle-ci venant lui perforer l'épaule à la place, ce qui est toujours mieux bien que particulièrement handicapant. Il n'y avait pas à dire, le Vice-amiral n'avait pas volé sa réputation, et c'est ce qui rendait leur accrochage si intéressant. Et lorsque son second vint le tenir au courant des nouvelles et du fait qu'ils étaient tous en train de couler et que du coup leur frégate ne pourrait jamais les porter jusqu'à l'île la plus proche, la décision que tous voyaient venir depuis plus de dix minutes arriva enfin. Il leur demanda à tous de se replier et de sauter dans les canots pour se casser de là au plus vite, sans oublier au passage de faire comme ils faisaient d'habitude dans ce genre de situations. Si bien que, alors que les canonniers qui se repliaient déversaient au sol toute la poudre qu'ils pouvaient, d'autres matelots fracassaient au sol les lampes allumées du navire, si bien que la frégate toute entière commença rapidement à flamber et le feu à se propager sur le vaisseau de la Marine toujours collé au leur.

Faisant de grands moulinets avec son sabre, qu'il tenait de son bras encore valide, afin de se protéger, Antonio s'assura que ses hommes encore vivants parvenaient à tous se replier malgré la fournaise qui grandissait autour d'eux. En bon Capitaine, Antonio fut le dernier à envisager de quitter le navire en flammes.

"Rainworth, j'espère que vos embarcations de secours sont prêtes !"

Et sur ces seules paroles adressées, ou plutôt hurlées, à l'encontre du Vice-amiral, le Capitaine Fernandez traversa le pont en flammes de la frégate dans une course furieuse avant de sauter à l'eau d'un bon puissant et d'atteindre le canot de secours le plus proche où l'attendaient une partie de ses hommes, les autres s'éloignant déjà aussi rapidement que possible de là où les navires flambaient.

Antonio avait foutu un beau bordel et ça lui suffisait largement.

L'enflure. Le lâche. Je relevais ma tête et je le voyais sans aucune égratignure, enfin presque, il avait une épaule en vrac. Ses jours n'étaient pas en danger. Cela devenait grotesque. Cette bataille n'avait aucun sens. Max avait merveilleusement bien réagit, neutralisant une bonne partie des pirates avec une voile qui les avait écrasés, puis comme de par hasard, leur mât s'effondrait également. Heureusement pour moi, c'était des pirates de bas étages, il m'était donc facile d'en abattre plusieurs à la fois. A chacun de mes pas, je sentais que le pont n'allait pas tarder à rendre l'âme. Je supposais qu'il en était de même pour notre frégate. Je regardais Maximilienne, puis sans parler, je lui ordonnais de descendre sur les embarcations sorties auparavant et de partir sans m'attendre, ce n'était qu'une question de minutes. Ces enfoirés dispersaient de la poudre à canon un peu partout, puis enclenchaient un incendie à l'aide de lampes. Tout s'enflammait rapidement. J'étais au milieu de ce vacarme, puis je voyais le capitaine de ces pirates qui prenait la fuite avec tous les survivants. Je ramassais un fusil qui était au sol, puis je courrais en direction des ennemis. Je me mettais au bord du navire, assez instable, je visais ce vicieux capitaine et tirais. J'avais atteint le genou. Il criait de douleurs.


« Je ne tue pas de corps que je ne peux ramener à la base, alors à notre prochaine rencontre, j'espère que tu te souviendra de ces douleurs, car tu n'en auras plus d'autres. »


Je sentais une énorme chaleur à mon dos. Je n'avais plus longtemps. Les pirates allaient me tirer dessus, j'étais dans l'obligation de traverser les deux bateaux et tenter de rejoindre mes hommes. Je m'élançais dans une course effrénée, observant les points les moins sensibles pour y placer mes appuis. Je courrais. Encore et encore. La lumière ne m'était plus visible. Je toussais. Je suffoquais. Allais-je mourir ? J'étais certainement sur notre frégate et j'atteignais rapidement l'autre côté de ce dernier. Je n'avais plus qu'à plonger, mais je ne voyais plus rien, je n'avais plus force. Je m'étais laissé tomber. L'impact avec l'eau fut terrible. Je perdais connaissance. Soudainement, une lumière m'attrapait, puis c'est une fois sortis de l'eau que je me rendais que mes braves soldats m'avaient attendus. Des gentlemans par excellence.


« Vous avez désobéis, chers soldats... Mais je vous remercie, vous m'avez sauvé la vie. Excellent travail, maître Grevy. »


Le regard faible et totalement épuisé, j'essayais de ne pas m'endormir face à mes hommes. Je me devais de rester droit comme un poteau, bien que légèrement allongé par mes hommes.